Huitième des 10 premiers chapitres du Roman Concorda – La Théorie des Quanta, sorti le 18 Janvier (cliquez ici pour vous le procurer)
Vous pouvez aussi lire les 10 premiers chapitres intégralement en cliquant ici si vous le souhaitez
————————————————–
Les invitations au bureau de Chelsea étaient rares.
En fin d’après-midi Gary Rindter avait convié Sir Richard Brown et l’agent Hugo Stam pour une réunion d’urgence.
L’objet était l’avenir de l’équipe Aspid F1 Team.
L’opération avait pris le nom de code de « l’arche »
– Avant de débuter j’aimerais féliciter Hugo pour son coup auprès de Williams. Comment tu as fais ? demanda Sir Richard Brown.
Hugo Stam esquissa un sourire.
Fière de lui, mais concentré.
– L’an dernier pour le volant McLaren j’ai proposé dix millions d’euros en cash sponsoring et ensuite l’équipe devait rétrocéder 40% au pilote en salaire, pour un contrat d’un an avec option pour trois autres. Williams n’avait pas les mêmes moyens, j’ai proposé six millions d’euros en sponsoring, mais l’intégralité servait à payer le salaire de Damon. Ils ont accepté. Surtout qu’il y a une promesse au bout de quarante huit millions d’euros à partir de la saison prochaine pendant deux saisons, s’ils acceptent de lui offrir le salaire souhaité pendant deux ans. Salaire que j’ai accepté de baisser de 25% par rapport à l’option de McLaren.
– La carotte est le bâton, cela ne fait pas de mal, concéda Brown.
– McLaren a été trop orgueilleux en refusant de payer Damon le salaire souhaité. Certes il était exorbitant, mais avec cinquante cinq millions d’euros de sponsoring pendant trois ans, cela ne se refuse pas. Surtout vu leur situation actuelle, coupa Gary Rindter.
Agité sur son fauteuil, la mine sombre derrière ses lunettes, Rindter ne pouvait cacher plus longtemps sa préoccupation.
La situation d’Aspid le préoccupait au plus au point.
La Formule 1 avait déjà perdu deux équipes en trois saisons et il y avait encore trop de menaces de faillites.
Les mains liés par un nouveau contrat le liant par pacte entre actionnaires, il ne pouvait plus prêter d’argent comme il pouvait le faire par le passé.
Une certaine équipe anglaise n’aurait jamais été neuf fois championne du monde des constructeurs si de temps en temps, Rindter ne lui avait pas prêté cinq millions de dollars ici et là.
Mais aujourd’hui la situation était différente.
Il ne pouvait plus jouer les banques.
Simplement joué sur les avances de droits télévisuelles.
Un bien maigre consolation, malgré l’impact important de ces droits sur le budget des équipes.
L’Arche, le nom de code de l’équipe Aspid F1 Team, en difficulté avait demandé en début de saison une avance et Rindter anticipait déjà une seconde pour l’été avenir.
– L’Arche est dans une mauvaise pente, débuta Rindter. Ses difficultés sont écrites. Il lui reste une année, peut-être trois avec une réforme et des licenciements. Tout ceci est une question de taille et de structure. Elle ne peut pas prétendre être un top team, sans avoir les moyens d’un top team.
– Sa structure est à deux têtes. D’un côté Lamassu Capital et de l’autre le groupe dirigé par Anthony Milan qui n’a seulement que 2 % de l’équipe, mais son emprunt de soixante quinze millions d’euros fait la différence. Pour se relancer, il faudrait que l’équipe soit plus forte, plus riche, innover et pouvoir garantir pour financer son développement. Ajouta Hugo Stam.
– Et Milan quel est sa position ? demanda d’une voix neutre Rindter
– Il est en manque de liquidité. Le mandat de remboursement était pour décembre de l’an dernier. En échange de quoi il prendrait le contrôle de l’équipe pour se rembourser sur la bête. Ce qu’il se passe en ce moment visiblement. Reste Lamassu Capital…
Le nom était lâché.
La saison dernière déjà, Rindter avait mandaté Stam pour développer un ticket de rachat de l’équipe.
Un projet financé par le groupe de communication Hunt et du pilote ayant le meilleur rapport économique/performance du moment : Damon Hunt.
Après quelques semaines de négociations, il était évident que cela ne pouvait pas aboutir.
Il y avait d’autres intérêts en jeu.
– Cette équipe avait déjà changé de moteur entre l’an dernier, malgré un contrat solide, pourquoi ?
Stam répondait encore.
Connaissant le dossier.
– L’accord avec les français était d’une durée de trois années fermes et une quatrième en option sous conditions de résultats. L’année précédente, le moteur était payé par une exposition médiatique plus importante sur la voiture et le maintient des dernières parts que le constructeur avait dans le capital. Toutefois le dédit était estimé à cinquante millions d’euros et payé jusqu’en 2020.
Le constructeur français a changé de management depuis quelques temps.
La seule ligne de conduite est celle de la rentabilité et la création de valeur pour leur patron.
Le premier projet imposait un important financement du constructeur. Cela a été le coup de froid pour cette alliance. Mais il y a toujours un contact entre l’équipe et le constructeur.
Sans évolution notable.
La cause à l’emprunt de Milan.
– Le plan de reprise indiquait quoi ? demanda Rindter sachant déjà la réponse.
– 60% pour Lamassu Capital et 40% pour le constructeur français, sauf qu’au dernier moment la redistribution des cartes c’est établit à 50-50. L’accord c’est arrêté là.
Rindter ne disait rien.
Songeant aux difficultés de perdre une équipe de ce calibre dans le paddock dans un avenir proche.
Cela aurait fait un effet domino terrible.
Il regarda Sir Richard Brown qui n’avait encore rien dit.
– Vous en pensez quoi Richard ?
L’ancien agent du MI6 et Sénateur de la Fédération Internationale du Sport Automobile s’enquerra d’une remarque.
– La situation est difficile pour cette équipe, Michael Thieme ne souhaite pas répondre à des demandes d’interviews, son discours est positif pour l’équipe. Mais je me demande pourquoi elle a quittée son contrat avec ce constructeur pour un autre, à peine six mois plus tard. Certes le moteur est plus performant, mais plus cher et avec le dédit j’ose imaginer ce que cette équipe doit débourser chaque année rien que pour son moteur.
– Et cette histoire avec l’actionnaire il y a deux ans cela a donné quoi ? grogna Rindter qui commençait à devenir de méchante humeur.
– Rien. J’ai envoyé un de mes agents obtenir plus d’informations sur ce sujet. Mais visiblement les 35% qu’il détenait sont toujours dans l’air ou alors probablement la propriété de Milan, car le rachat devait permettre le remboursement de l’emprunt, estima Brown.
– Quelle mécanique financière compliquée, de mon temps c’était quand même plus simple, pensa à haute voix Rindter.
– Les hommes étaient aussi différent, monsieur. Enchaîna Stam
– Il faut rendre l’équipe plus jolie et reproduire ce que nous avons fait avec Caterham l’an dernier. Vous êtes d’accord ?
Hugo Stam opina, puis se leva indiquant qu’il avait un rendez-vous.
Il ne restait que Gary Rindter et Sir Richard Brown dans le bureau.
– Il faut que tu trouves une solution Richard. Je me méfie d’une alliance entre les allemands et les italiens. Il se trame quelques choses dans mon dos. Regarde ce que tu peux trouver de ton côté sur l’actionnaire mystère et surtout, essayons de trouver une solution avec Stam pour un rachat de l’équipe.
Richard Brown ne disait rien.
Son regard absorbé par les branches des arbres fouettant légèrement la fenêtre de la pièce.
Le vent c’était levé.
L’orage était proche.