Lorsque durant l’été 1991, Honda annonce à Ron Dennis son retrait de la Formule 1 à la fin de la saison 1992, l’attitude maîtrisée du manager anglais sombra dans une incertitude nouvelle. Au sommet de sa domination, enchaînant son 4ème titre mondial des constructeurs en 4 saisons avec le motoriste japonais, le mariage prendra fin quelques mois plus tard. Honda promettait un moteur nouvelle génération pour 1992 et les deux parties s’entendent pour terminer leur histoire sur un 5ème titre consécutif. Il n’en sera rien.
Reste à Ron Dennis à trouver un moteur compétitif pour 1993 afin de rester au sommet et concurrencer le duo » Williams F1 Team-Renault « qui commençait son âge d’or. La piste d’un retour de Porsche est rapidement abandonnée, suite aux piètres performances des moteurs allemands dans la Footwork de 1991. De son côté, Ford fournissait ses moteurs V8 HB en priorité à Benetton, enfin le prometteur moteur Illmor, dont Mercedes-Benz pris 25% discrètement durant l’année 1992 est réservé à la future équipe suisse Sauber. L’impasse était grande pour McLaren durant les mois d’été de la saison 1992. Deux solutions : Renault ou exploiter le nouveau moteur V12 Honda.
La piste Renault s’activa relativement vite… La marque française n’était pas contre d’équiper deux écuries de haut niveau. Ron Dennis et Mansour Ojjeh élaborent une stratégie visant à racheter Ligier pour obtenir le V10 français. Le projet était séduisant sur le papier : Moteur V8 HB client avec électronique TAG, boîte de vitesses et suspensions actives McLaren et mise à jour de la monoplace française par les ingénieurs anglais de Woking (quatre fois par saison). Le verrou ELF sera compliqué à faire sauter à cause de l’accord McLaren-Shell de l’époque, mais n’était pas impossible. De plus l’idée d’avoir une rivalité Senna-Prost sur deux voitures motorisées par Renault mais sur deux voitures différentes était séduisante pour 1993 et 1994. L’histoire aura été autrement et Flavio Briatore emportera la mise début 1994 et Benetton Formula avait signé un accord de fourniture pour 1995 avec Renault Sport.
L’autre poste était l’exploitation du futur V12 Honda. La marque japonaise avait dépensé pour sa conception l’équivalent de 230 Millions de dollars d’aujourd’hui. Un record pour un moteur utilisé une seule saison. L’idée de Ron Dennis était de débaucher le directeur technique de Honda, Ossamu Goto, pour ensuite développer une société capable d’exploiter le développement du moteur V12 pour la saison 1993 et au-delà. La FIA venait d’annoncer que le moteur 3.5 Litres pouvait continuer d’être utilisé en Formule 1 jusqu’en 2000, la perspective permettait de gagner du temps. D’autant que Peugeot était en approche et que Mercedes-Benz n’avait pas dit non. Les solutions moteurs pour McLaren étaient à moyen terme et pas à court terme.
Mais il y a eu d’autres pistes. Courant 1992, Ron Dennis échange avec Paul Rosche alors le gourou moteur de BMW Motorsport en Allemagne. La marque à l’hélice motorise le projet de voiture de route de McLaren et dispose dans ses cartons un moteur V12 de Formule 1 qui devait faire ses débuts en 1992. BMW ne voulait plus d’un projet F1 et Dennis a rapidement abandonné cette piste. En mai 1992, Le groupe Vickers (propriétaire de Rolls-Royce-Bentley et Cosworth) cherche à vendre ses actifs à bon prix. Mais n’obtiendra rien dans un premier temps. Toutefois cette première approche va être bénéfique pour la suite.
En 1993, McLaren est équipé d’un moteur V8 Client. Ron Dennis pour obtenir l’officiel va user d’astuce pour contourner le contrat Benetton. Dans un premier temps il propose Ossamu Gotto pour concevoir le nouveau V12 Cosworth Zetec-R qui sera rapidement abandonné au profit d’une architecture V8 pour 1994. Puis relança au printemps 1993 la piste d’un rachat de Cosworth auprès du groupe Vickers. Cette pression lui permettra d’obtenir un peu plus de puissance pour Ayrton Senna.
Septembre 1993, Ayrton Senna, essaie une McLaren MP4-8 équipée d’un V12 Lamborghini. L’idée d’avoir un accord avec Chrysler est autant important à l’esprit de Ron Dennis que l’unité Lamborghini Engineering en Italie. En fait, le constructeur américain veut vendre la marque italienne. La mise à prix sera de 50 millions de dollars. Ossamu Gotto et l’ingénieur en chef Mauro Forghieri retouchent le moteur V12 italien, qui gagne plusieurs dizaines de chevaux. Ayrton Senna, lui-même fait des louanges sur ce bloc ultra puissant et fiable. Mais Chrysler ne voulait pas vendre séparément le bureau d’étude moteur et le constructeur italien. L’affaire échoue. Le 8 Octobre 1993, McLaren signe un contrat de 4 ans avec Peugeot, puis le rompe pour une union avec Mercedes-Benz. Ossamu Gotto est libéré de McLaren durant l’hiver 93/94 et trouvera refuge chez Ferrari ou il dessinera le V12 le plus puissant de l’histoire de la marque (830cv en 1994 et ressemblant étrangement au Lambo) et le V10 de 1996 de la Scuderia.
Estimant que les titres de champion du monde des années 80 et 90 lui donnerait une image de marque certaine, Ron Dennis estimait qu’il était temps de développer son propre moteur à cette époque. Du moins se baser sur un moteur déjà existant et prestigieux. Le V12 était une cible à l’époque logique.
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