L’échec des accords entre Red Bull et Porsche ouvre de nouvelles perspectives, tout en dévoilant les approchent différentes des deux partenaires, dont on se demande s’il y avait un intérêt d’alliance au départ.
Retour à 2020. Honda annonce son retrait après la saison 2021. Red Bull, sous l’impulsion de Christian Horner, soutenu par Adrian Newey et Helmut Marko esquisse un plan pour l’avenir. Impossible de redevenir client ou partenaire d’un constructeur présent (Ferrari, Mercedes ou Renault). Le souvenir de la précédente expérience avec Renault 2014/2018 hante encore les murs de Milton Keynes. L’ambition est de construire son propre moteur pour 2022.
Honda accepte de céder la licence de son RA621H pour 4 ans (2022/2023/2024/2025), puis suite au titre de champion du monde de Max Verstappen, le constructeur japonais a accepté de construire le moteur 2022, afin de l’adapter à la nouvelle réglementation des carburants E10. Un investissement de 20 millions d’euros pour Red Bull envers Honda. En parallèle, les ambitions politiques de Red Bull était de faire geler le développement des moteurs dès 2023 et jusqu’en 2025. Seul condition pour que le projet soit viable. La FIA ira dans le sens de la réal politique moteur du constructeur autrichien.
Avec un moteur sous licence jusqu’en 2025, une réglementation de gel moteur, un support technique de Honda pour 2022, le plan est bien organisé.
Reste la question de 2026.
Dietrich Materchitz, du haut de son empire envisage l’avenir. A 78 ans, l’idée de pérenniser son entreprise devient une priorité. Disposant toujours de 49% de sa société, le solde (51%) à Chalem Yoovidhya. L’heure est ainsi venu de trouver des partenaires solides pour l’équipe F1. Les discussions avec Porsche ont eu cette première motivation.
Porsche AG, motivé pour enfin démontrer son savoir faire dans une discipline qui lui a toujours résisté (hormis l’épisode TAG entre 1983 et 1987), engage des discussions et accepte de revenir à la condition que la réglementation moteur 2026, soit en adéquation avec leur future politiques. En échange, Materchitz propose une participation de 50% dans Red Bull Technology (RBT), l’entreprise qui conçoit depuis 2006 les Red Bull qu’engagent Red Bull Racing. Le montant de la transaction est évolutif est estimé à 300 millions d’euros. En échange, la marque allemande s’engage à financer le projet moteur, à hauteur du futur budget plafonné d’environ 130 millions d’euros (130 millions de dollars) par saison sur la période 2026/2030.
Le projet Red Bull Powertrain avance à grand pas. 300 personnes composent l’unité nouvelle en 2022, c’est encore près de 3 fois moins que ses concurrents, mais l’embauche d’Andy Cowell courant 2021, l’un des meilleurs ingénieur moteur de la décennie, annonce l’avenir. L’objectif est de construire un moteur 2026 et l’étude doit débuter en 2022. En plus du programme moteur, Horner et Newey annonce le lancement de la RB17. Une hypercar dans la lignée du programme Aston Martin Valkyrie qui a rapporté une centaine de millions d’euros à RBT. Avec ce projet, Adrian Newey souhaite marcher sur les pas de Gordon Murray qui a lancé à T50 et la T33, tout en développant ses projets automobiles. En cela, la Valkyrie est pour Newey la McLaren F1 de Murray.
Le duo Horner/Newey avance dans ce double projet d’unité moteur et hypercar. Le premier serait financé par Red Bull à 100% (95 millions d’euros par an), tandis que le second pourrait rapporter 150 millions d’euros au financement de l’ensemble du programme F1 du campus de Milton Keynes et c’est un signe d’indépendance face au projet Porsche. Pourrait-on croire.
Une alternative apparait alors au début de l’été, au moment où l’accord avec Porsche est au ralenti. Horner et Marko discute avec les dirigeants de Honda. Le constructeur japonais souhaite être plus présent en 2023 sur les monoplaces autrichiennes. Un chèque de 30 millions est en négociation. Pour la période 2023/2025, un modèle se met en place. Honda est le fournisseur principal de Red Bull Powertrain, contre 95 millions d’euros par an, auquel sera rétrocédé 30 millions à Red Bull Racing. Parallèlement, Honda souhaite participer au projet 2026.
A court terme, Horner propose un financement au projet Powertrain (comme prévu dans le business model) avec le concours de Honda et l’association avec un constructeur pour 2026.
Economiquement le calcul est simple :
2022 à 2025, le coût avec l’association de Porsche serait de 380 millions d’euros pour Red Bull. Mais 650 millions d’euros de financement jusqu’en 2030 par la marque allemande, en plus d’une participation de 50% à hauteur de 300 millions d’euros. En bref, un investissement de 380 millions pour Red Bull et un investissement de 950 millions pour Porsche.
En comparaison, le coût pour 2022 à 2025 du projet Horner/Honda serait de 260 millions d’euros, 120 millions provenant de Honda sous forme de labélisation. Mais 2026 est encore flou, malgré l’intérêt de la marque nippone pour continuer l’aventure. Auquel cas, cela serait 650 millions d’euros qui sont investis. Reste la prise de participation…
Mercedes et Red Bull ont des destins assez similaire et s’inspirent mutuellement, malgré les rivalités. Si Porsche a découvert que Adrian Newey n’était pas employé de Red Bull Technology en tant que CTO, mais employé directement par Dietrich Materchitz, l’attractivité est moindre. De son côté, Horner pourrait souhaiter être l’équivalent de Toto Wolff, c’est-à-dire actionnaire à hauteur de 30%. Helmut Marko ou Adrian Newey pourrait avoir une aspiration de disposer d’une part dans l’équipe autrichienne également. Ainsi, avec 40 ou 50% de l’actionnariat contrôlé par Horner/Marko/Newey, le projet Red Bull F1 pourrait envisager l’avenir. Au lieu d’avoir les ordres d’un constructeur. Détail qui a été révélé par Christian Horner, lors de l’échec des négociations avec Porsche. Reste que ce projet serait un leg de Materchitz envers ses fidèles collaborateurs, ayant développer le projet F1 depuis 2005/2006, et non un gain par une vente comme le projet avec Porsche pourrait rapporter.
Finalement l’accord avec Porsche a été stoppé. Sans avoir vraiment débuté. Il était le fruit d’une anticipation d’avenir du patron, mais la réaction des acteurs de terrains du projet F1 a provoqué un malaise interne. L’ombre de Honda et des projets industriels ambitieux, semble avoir convaincu Materchitz. Attendons maintenant les distributions de participations gratuites pour définitivement conclure cet épisode Red Bull/Porsche…
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